Poussière, tu retourneras poussière (d'étoile): les funérail

Poussière, tu retourneras poussière (d'étoile): les funérailles spatiales


Par Richard INGHAM



PARIS (AFP) - Poétiques et innovantes pour
certains, dispendieuses et de mauvais goût pour d'autres, les
funérailles dans l'espace ont de l'avenir: l'envoi dans le cosmos il y
a dix ans des cendres du créateur de la série télévisée Star Trek a
fait depuis plus de 300 émules.
Les restes de Gene Roddenberry ont été
suivis de ceux de l'astronome qui a découvert Pluton, Clyde Tombaugh,
de l'astronaute américain Gordon Cooper, de l'acteur de Star Trek James
Doohan et du découvreur de comètes Eugene Shoemaker, dont les cendres
sont enfouies dans la Lune.
Mais nombre d'inconnus, tombés amoureux
des cieux et pour lesquels leurs proches n'ont pas trouvé de plus bel
hommage, ont aussi entrepris ce voyage vers "l'ultime frontière" au
lieu du cimetière local.
Vers 2012, jusqu'à 10.000 funérailles de
ce type pourraient avoir lieu chaque année, selon la société Space
Services ("Services spatiaux"), basée à Houston (Texas), en pointe sur
ce marché insolite mais hautement prometteur.
"Les gens de la génération du baby-boom
n'ont pas la même conception que leurs parents de l'empreinte qu'ils
veulent laisser", explique Charlie Chafer, un responsable de Space
Services.
"Les obsèques solennelles et l'enterrement
à côté de grand-mère parlent encore à beaucoup de gens, mais il y en a
aussi plein qui veulent célébrer et faire un lieu de mémoire des
endroits et des activités qui étaient importants dans leur vie. Nous ne
sommes pas surpris du succès. L'espace fascine", commente-t-il.
L'envoi dans l'espace ne concerne qu'une
quantité symbolique de quelques grammes de cendres placées dans une
petite capsule embarquée dans un satellite commercial ou scientifique
qui a un peu de place à vendre.
L'un des services offerts par la société,
le Earth Return Service ("Service Retour sur Terre"), permet d'envoyer
les cendres flirter avec l'espace, à une altitude de 115 kilomètres,
avant de retomber sur terre en parachute. Le coût: 495 dollars par
gramme, 995 dollars pour 7 grammes.
"Nous renvoyons la capsule dans une jolie
boîte avec un certificat prouvant que papa, maman ou le cousin est
parti dans l'espace puis revenu sur terre", explique gaiement M. Chafer.
Pour 1.295 dollars le gramme (4.955 les 7
grammes), la compagnie propose également de mettre les cendres à bord
d'un satellite placé en orbite basse. Elles tourneront autour de notre
planète entre 10 et 200 ans, selon l'altitude. Au final, les cendres
seront consumées dans une traitée de feu produite par la friction du
satellite avec l'atmosphère.
Six vols ont été organisés jusqu'ici et un
7e est prévu en octobre, portant les cendres de 300 personnes:
Américains, Canadiens, Britanniques, Allemands, Japonais et
Autrichiens. Un projet va encore plus loin en prévoyant de satelliser
des cercueils spatiaux autour du Soleil pour l'éternité, comme une
comète.
Cette niche lucrative, inventée par Celestis, le prédécesseur de Space Services, attire la concurrence.
Une société canadienne, Columbiad Launch
Services, prend les commandes pour un lancement par canon balistique
d'un missile qui ira jusqu'à 250 km dans l'espace, où les cendres
seront dispersées dans l'espace et retomberont peu à peu sur Terre. Il
en coûte 12.500 dollars pour la totalité des restes produits par une
incinération, ou jusqu'à 3 kilo de cendres.
L'idée des funérailles dans l'espace ne
séduit pas tout le monde, d'autant que nombre de cultures et de
religions refusent l'incinération.
L'astronaute français Jean-François
Clervoy, un vétéran des navettes spatiales américaines, en est lui un
défenseur enthousiaste: "J'aime bien cette idée qu'on naît à partir de
poussière d'étoile et qu'à la fin, on peut retomber sur Terre comme
poussière d'étoile.