Carte judiciaire: des avocats de province expriment leurs cr

Carte judiciaire: des avocats de province expriment leurs craintes avec des roses




Venus
de Tulle, Belfort, Millau, Brive ou Dole, des avocats sont montés à
Paris lundi pour crier leur refus de voir leur tribunal fermé par la
prochaine réforme de la carte judiciaire, et avec lui "disparaître la
vie de nos provinces".
La ministre de la
Justice, Rachida Dati, a beau répéter que sa réforme n'est qu'en
gestation, l'inquiétude monte dans les petits tribunaux depuis que les
35 chefs de cours d'appel ont envoyé fin septembre leurs propositions
pour rationaliser la dispersion sur 800 sites des 1.200 juridictions
françaises.
La Chancellerie n'ayant toujours
pas publié ces propositions, la presse ou les déclarations d'élus
locaux nourrissent les rumeurs, au point que des avocats et des
bâtonniers -chefs élu d'un barreau- sont passés lundi par dessus leurs
instances représentatives pour se faire entendre.
Revêtus
de leurs robes, une trentaine d'entre eux sont allés porter de gros
bouquets de roses blanches devant la porte de Rachida Dati "en signe
d'espoir et d'ouverture au dialogue".
Manque
de chance, la place Vendôme était encerclée par les gendarmes mobiles
attendant l'arrivée d'un juge et des jurés britanniques devant procéder
à une reconstitution des dernières heures de la princesse Diana en
1997, morte après avoir quitté en voiture le Ritz, palace mitoyen de la
Chancellerie.
Bloqués avec ses collègues
pendant plus d'une heure, le bâtonnier de Fontainebleau
(Seine-et-Marne), Jean-Louis de Bourbon-Busset, est "très inquiet: j'ai
appris par la presse que notre tribunal serait supprimé", dit-il.
"Il
n'y a eu aucune concertation", fulmine Yves-Marie Lehmann, avocat de
Dole (Jura) et conseiller régional UMP. Son bâtonnier, Marie-Lucile
Angel, croit savoir que son tribunal deviendrait une simple chambre
détachée de Lons-le-Saulnier "alors qu'il n'y a même pas de transport
en commun".
Sous un panneau proclamant
"Belfort, tribunal à vendre", Odile Bertrand, ancien bâtonnier, redoute
que le Territoire devienne "le seul département de France sans tribunal
de grande instance".
Jérôme Alirol, bâtonnier
de Millau (Aveyron), pense que son barreau sera fusionné avec Rodez, "à
100 km de là par des routes de moyenne montagne". "Economiquement, un
cabinet qui n'est pas à côté d'un tribunal n'est pas rentable ",
souligne-t-il, rappelant que l'aide juridictionnelle, versée aux
avocats défendant les justiciables sans moyens, ne rembourse pas les
frais de déplacement.
En Corrèze, l'un des
deux tribunaux -Brive et Tulle- devrait disparaître. "A Brive, on est
quatre fois plus important que Tulle, préfecture qui vit sous perfusion
avec les administrations alors que la vie économique est chez nous",
argumente Maryvonne Murat, ancien bâtonnier.
"Mais
Tulle est au centre du département", réplique sa collègue Martine Gout.
"Oui, mais tous les délinquants sont à Brive", contre-attaque Me Murat.
Toutes
deux se retrouvent pourtant face aux rumeurs selon lesquelles leur
département dépendrait d'un pôle de l'instruction regroupé ... en
Haute-Vienne, à Limoges.
"Le paradoxe actuel,
résume un avocat, c'est qu'on veut supprimer les juridictions qui sont
proches des gens au moment où on crée des tribunaux de proximité".
Une
petite délégation sera finalement reçue par le directeur-adjoint du
cabinet, Stéphane Noël. "Il nous a seulement dit que la réforme serait
connue +prochainement+", dit Me Alirol.