La station antarctique Concordia s'ouvre sur le cosmos

par **@lex** Dim 11 Fév - 12:35

La station antarctique Concordia s'ouvre sur le cosmos

Un oeil sur les mesures de turbulences atmosphériques, l'autre rivé sur une étoile, les astronomes de la station franco-italienne Concordia en Antarctique, au Dôme C, construisent les fondations de ce qui pourrait devenir l'observatoire du futur à AstroConcordia.
La première étape, explique Hervé Trinquet, post-doctorant du CNRS/Laboratoire universitaire d'astrophysique de Nice (LUAN), consiste à "étudier le site pour ses qualités optiques du point de vue de l'astronomie".

Ses dernières mesures confirment les premières observations: la couche de turbulences atmosphériques génante pour l'astronomie "est d'environ 30 m en hiver, ce qui est unique au monde". D'autre part, "90% de toute la turbulence est au sol" alors qu'ailleurs il existe plusieurs couches turbulentes en altitude.

Un nouveau télescope de 40 cm, équipé d'un photomètre, lui fournira un des paramètres recherchés dès cet hiver, autorisant "les premières mesures photométriques à Dôme C, pour mesurer l'absorption de l'atmosphère".

Concordia présente un autre avantage pour l'astronomie dans l'infrarouge, capable d'observer des astres de très faible luminosité, et dans le millimétrique (le visible): un taux très faible de vapeur d'eau.

Ces avantages, se félicite Hervé Trinquet, ont permis au LUAN d'imaginer "le projet "Keops", un interféromètre de 36 télescopes de 1,5 m disséminés dans un cercle d'un kilomètre de diamètre, soit un ensemble correspondant à un télescope de 30 m". Les premiers pourraient être installés dès 2008.

Mais l'observation du ciel à Concordia est déjà réalité. Djamel Mékarnia, de l'Observatoire de la Côte d'Azur/CNRS, a l'oeil pointé sur une étoile avec deux télescopes jumeaux de 30 cm au sol, et un autre posé sur une plateforme à 8 m de haut.

Par ailleurs, il analyse par photométrie "comment le ciel laisse passer la lumière" et il attend avec impatience l'hiver et ses trois mois de nuit complète pour "pouvoir suivre en continu, 24 heures sur 24, pendant une semaine ou 15 jours" des étoiles spécifiques.

Un de ses télescopes lui sert à observer le Soleil qui, en cette fin d'été austral, ne se couche pas. Quant l'hiver s'installera sur Concordia, il le tournera vers le bord de la Lune.

Enfin, il se prépare déjà à recevoir dès l'an prochain "un nouveau télescope pour regarder une région d'étoiles en continu et tenter de détecter des planètes extra-solaires".

Non loin des cinq télescopes du LUAN, les Italiens ont eux aussi commencé à installer deux miroirs, dont un de 2,6 m, pour travailler dans le domaine des ondes millimétriques.

Runa Briguglio, de l'université de Rome, doit également tester dès cet hiver, dans le cadre du programme Irait (Infrared Robotic Automatic International Team), un petit télescope optique de 25 cm pour mesurer la variation d'intensité d'étoiles comparables à notre Soleil. Et à l'automne prochain il recevra un grand miroir de 80 cm pour travailler en infrarouge.

Mais Concordia n'en a pas moins ses défauts, reconnaissent les astronomes. Son accès est difficile, les miroirs givrent et même pendant la longue nuit polaire, le ciel n'est pas d'un noir total parce que le Soleil n'est jamais assez loin au-dessous de l'horizon.

Une dernière contrainte terrible, le très grand froid, réjouit Soren Moller Pedersen, de l'Université technique du Danemark. La barbe blanche de givre, il teste son magnétomètre, posé à même la neige, dans les plus mauvaises conditions: l'appareil, destiné à être installé à la surface de Mars, devra supporter les variations thermiques de Concordia, comparables à celles de la planète rouge (entre -30° C et -70° C).